Eric Martin : « Mon quotidien de ludothécaire auprès des enfants malades »

Eric Martin : « Mon quotidien de ludothécaire auprès des enfants malades »

Eric Martin est animateur pour les PEP 75. Son rôle ? Ludothécaire ! Il se rend au domicile des enfants déscolarisés pour longue maladie afin de jouer avec eux et les divertir de façon ludique. Un service proposé par l’APADHE, qui leur permet d’oublier un quotidien difficile, une vraie bouffée d’oxygène. Interview.

« Mon rôle de ludothécaire permet aux enfants de s’évader par le jeu et d’oublier les situations souvent difficiles qu’ils traversent. »

 

As-tu toujours voulu travailler auprès des enfants ?

Eric Martin : J’ai fait des études commerciales avant de totalement bifurquer pour faire l’école du mime Marceau… Je ne dirais pas que j’ai toujours voulu travailler avec des enfants, c’est plus le hasard des rencontres et des projets qui m’a amené à le faire.

A quel moment as-tu commencé à travailler avec les PEP 75 ? Qu’est ce qui t’a plu dans cette association ?

J’ai commencé à travailler aux Pep 75 à un moment où j’étais moins satisfait de mon activité artistique. Ce qui m’a plus en premier lieu c’est l’équipe et les projets de l’association.

Quelles sont les valeurs qu’elle véhicule et qui te touchent particulièrement ?

Je dirai sans hésiter que c’est la valeur de la solidarité. Un grand nombre de projets de l’association ont pour but d’apporter l’accès à l’éducation et aux loisirs à tous les enfants et particulièrement auprès de ceux qui risquent d’en être privés à cause de leur situation sociale ou parce qu’ils sont malades.

Justement, peux-tu nous parler de l’APADHE…

L’APADHE est le service d’Accompagnement Pédagogique À Domicile, à l’Hôpital ou à l’École. Il a pour but principal d’apporter l’enseignement à domicile des enfants qui sont malades, accidentés ou en refus scolaires. La ludothèque de l’APADHE s’adresse à ceux qui sont immobilisés chez eux pour une longue période.

 En quoi consiste ton rôle d’animateur « Ludothécaire » ?

Cela consiste à animer des jeux de sociétés aux domiciles des enfants malades. Je vais donc chez eux et je joue souvent seul avec eux, mais parfois aussi avec leurs frères et sœurs et même leurs parents. Depuis l’année dernière, j’accueille aussi dans les locaux des PEP75 des adolescents en refus scolaire pour des ateliers de jeux.

C’est une mission importante…

Oui. Ça  permet aux enfants de s’évader par le jeu et d’oublier les situations souvent difficiles qu’ils traversent. Certains ont l’obligation, du fait de leur maladie, de rester chez eux pendant de longues périodes. La ludothèque constitue alors une bouffée d’oxygène dans leur quotidien ainsi qu’un lien avec l’extérieur, un lien social qui risquerait d’être détérioré bien malgré eux. Les jeux permettent aussi d’apprendre (mettre en place des stratégies, compter, etc…) tout en s’amusant. Pour les parents, c’est souvent un moment de respiration, mais certains apprécient également de participer aux jeux !

« Les enfants sont pour moi des modèles d’espoir. Ils font preuve d’un courage incroyable pour affronter leur maladie ! Leur comportement m’apporte en retour de l’espoir et du courage dans les moments de ma vie où j’en ai besoin. »

Tes débuts ont été faciles ? Tu t’es tout de suite senti à ta place ?

Oui, je suis assez vite entré dans la peau du ludothécaire, c’est quelque chose d’assez naturel pour moi. Malgré tout aller aux domiciles des familles auprès d’enfants malades a été, et reste encore aujourd’hui, quelque chose d’assez « impressionnant ».

Qu’est-ce que tu éprouves au quotidien dans l’exercice de ton travail ?

Je dirais en premier lieu que c’est un travail très gratifiant, le fait d’apporter avec les jeux un moment de joie et de bien-être à des enfants qui en ont tellement besoin.

Peux-tu évoquer ton quotidien auprès des enfants ?

Je vais à leur domicile, parfois dans leur chambre, cela demande donc d’être très respectueux. Le lien avec les parents est aussi très important. Je peux dire que j’ai la chance d’être toujours très bien accueilli !

 Parle-nous des enfants et de ce qu’ils t’apportent aussi…

Les enfants sont pour moi des modèles d’espoir. Ils font preuve d’un courage incroyable pour affronter leur maladie ! Leur comportement m’apporte en retour de l’espoir et du courage dans les moments de ma vie où j’en ai besoin. Ils m’apportent aussi  des moments joyeux : certains enfants m’attendent derrière la porte d’entrée avec un grand sourire et trépignent d’impatience de découvrir les jeux que contient ma valise !

C’est un échange mutuel ?

C’est tout à fait ça, même si c’est à moi de choisir les jeux qui vont permettre à un enfant de s’amuser et d’apprendre. Quoique certains enfants apprécient de me faire découvrir leurs jeux favoris !

Il faut avoir un mental d’acier… Ou dirais-tu que c’est naturel chez toi ?

Je ne sais pas s’il faut avoir un mental d’acier en tout cas il vaut quand même mieux ne pas être trop fragile. J’ai une manière de percevoir la vie qui me permet d’appréhender avec espoir les situations difficiles que traversent les enfants et leur famille. Finalement grâce aux jeux les enfants (et moi-même !) sommes totalement dans le présent sans penser au futur ni au passé.

Tu as des anecdotes à nous présenter ? Des moments touchants ?

Ne le dites pas aux enfants mais il m’arrive parfois de faire exprès de perdre pour ne pas les rendre tristes… Plus sérieusement chaque année les enfants participent à la création d’un jeu de société.  En fin d’année scolaire nous organisons un goûter avec les enfants, leur famille, les enseignant(e)s qui vont à leur domicile et les coordinatrices de l’APADHE, Marie Lasnier et Barbara Moreau. De voir ainsi les enfants et les adultes se rencontrer autour du jeu constitue des moments très touchants pour tout le monde.

Comment décrirais-tu ton lien avec les enfants ?

J’ai parfois l’impression d’oublier que ce sont des enfants malades. Certains ont besoin de parler mais la plupart reste concentrer sur les jeux, qui permettent souvent aux enfants de s’exprimer. J’essaie bien entendu d’être à l’écoute et de m’adapter au mieux aux besoins des enfants. Les règles des jeux constituent toujours un cadre qui structure notre lien.

Qu’est-ce qu’ils attendent de toi ?

C’est assez varié. Certains aiment découvrir de nouveaux jeux quand d’autres au contraire préfèrent rejouer aux quelques jeux que je leur ai fait découvrir et qu’ils aiment particulièrement. Je crois qu’avant tout ils ont très envie de s’amuser !

Tu es fier de ton travail ?

Oui, je peux dire que je ressens une certaine fierté à faire ce travail. J’aime en parler autour de moi et les gens sont agréablement surpris qu’un tel travail existe ! Je dirais aussi que c’est un travail qui a du sens et pour moi c’est essentiel.

Si tu devais faire passer un seul message, lequel serait-il ?

Je pense qu’il serait bon que l’Éducation Nationale utilise beaucoup plus les jeux dans le processus d’apprentissage des enfants. Au niveau de la ludothèque de l’APADHE, je crois que les jeux, par ce qu’ils apportent aux enfants (bien-être, joie, développement cognitif…), participent au processus de guérison.

Découvrez notre projet handicap « Cinquième Jour » !

Découvrez notre projet handicap « Cinquième Jour » !

Moins de 10% des élèves en situation de handicap, scolarisés à Paris ou en Ile-de-France, profitent des offres culturelles de leur ville ou de leur région. Les obstacles sont de diverses natures : inaccessibilité du cadre bâti, inadéquation entre les animations proposées et les spécificités liées au handicap, manque d’information sur les propositions des sites culturels. Forts de ce constat, nous avons décidé de créer le projet « Cinquième Jour ».  Son objectif est simple : faire participer le public scolaire en situation de handicap à la vie culturelle de la capitale et lui permettre de valoriser ce moment en le partageant avec d’autres enfants. Il se déroule sur 8 à 10 séances.

 Projet handicap Cinquième jour Pep75Au cours des premières visites, les élèves en situation de handicap découvrent le site culturel partenaire et préparent l’accueil d’une classe de leur école. Lors de la dernière séance, ils deviennent des guides pour la classe accueillie et transmettent leurs connaissances. Actuellement nous travaillons avec plusieurs sites culturels partenaires : le musée du quai Branly, le Centre des Monuments Nationaux, le musée des Arts Décoratifs, le musée des Arts et Métiers mais aussi le musée du Louvre, le musée Guimet, la Cité des Sciences.

Interview de Paulette Rouan, Enseignante en ULIS Ecole.

Paulette, vous êtes enseignante en ULIS Ecole dans le 18ème arrondissement de Paris. Pourriez-vous nous décrire simplement le fonctionnement d’une ULIS au sein d’une école élémentaire ?

Les élèves scolarisés dans ma classe présentent des troubles des fonctions cognitives ou mentales, des troubles spécifiques des apprentissages, parfois des troubles envahissants du développement (dont l’autisme). L’ULIS école est un dispositif d’inclusion qui répond à leurs besoins éducatifs particuliers. Les élèves au nombre de 12 maximum, bénéficient, selon leurs possibilités et leur âge, de temps d’inclusion dans une classe de l’école. Ils peuvent y effectuer des apprentissages adaptés à leurs potentialités et leur rythme, en fonction du projet personnalisé de scolarisation de chacun (PPS). Ce dispositif fonctionne sur un tiers de cohorte environ : un tiers en inclusion et en regroupement un tiers avec l’AVSco et le dernier tiers avec le coordonnateur.

Vous avez expérimenté avec vos élèves la plupart des projets « Cinquième Jour » proposés par les PEP75. Comment avez-vous connu notre association ?

 J’ai découvert les projets « Cinquième Jour » par le biais du catalogue « Classes à Paris » qui déclinent des projets culturels. Les informations me sont aussi parvenues à l’issue de réunions avec l’ASH et de rencontres au sein des PEP 75. Depuis, j’ai apprécié coopérer avec le pôle Handicap de votre association qui propose un éventail de projets adaptés aux élèves de ma classe.

Pourquoi avoir choisi le projet « le Cinquième Jour »? Quels sont les apports pédagogiques d’un tel projet ?

Les apports sont multiples et répondent déjà aux grands axes de notre projet d’école, à savoir la maîtrise de la langue écrite et orale ainsi que la construction d’un patrimoine culturel commun. Le projet « Cinquième jour » va fédérer deux groupes d’élèves : l’un en situation de handicap et l’autre comprenant des élèves non handicapés. Ce projet utilise la culture comme objet de médiation et va aider les élèves de l’ULIS à se forger une conscience de groupe, leur permettre d’acquérir des savoirs et une ouverture au monde. Ce contact direct avec l’environnement culturel donne du sens aux apprentissages en privilégiant les mises en situation, le vécu et le faire puisque les élèves de l’ULIS école sont amenés lors de la dernière séance à transmettre leurs connaissances aux élèves de la classe invitée, en devenant à leur tour les guides du musée. Cette démarche valorise ainsi les réussites des élèves. Ces différentes formes d’inclusion (individuelle et collective) offrent l’avantage et l’intérêt de confronter les enfants de l’école à la différence, de lever certaines appréhensions ou résistances, de cultiver la tolérance. Les élèves de la classe invitée sont amenés à poursuivre leurs apprentissages dans la même école, à vivre, grandir et travailler ensemble auprès de leurs camarades de l’ ULIS, aussi ce type de projet ne peut que faire évoluer les représentations premières des enfants et de leurs familles grâce à l’écoute et la compréhension de l’autre.

Quel est l’intérêt pour vos élèves d’effectuer un projet dans un site culturel et sur une durée longue (8 à 10 séances sur 5 à 6 mois) ?

Ce travail de long cours permet d’inscrire l’élève dans une temporalité avec des objectifs à atteindre comme être capable de développer le langage d’évocation, de mémoriser des savoirs ou des faits. Les visites et ateliers permettent de faire des liens entre les notions travaillées en amont et en aval de chaque sortie, d’anticiper et de construire, d’alterner oral et écrit en étoffant le cahier d’histoire des arts. L’enjeu de l’enseignant est alors de faire de la mémoire de l’élève un objet de pensée, en le questionnant sur le produit de la mémoire : « de quoi te rappelles-tu ? » et sur son processus « comment as-tu fait pour t’en rappeler ? » Les élèves prennent des repères temporels concrets et s’y réfèrent tout au long de l’année. Une durée longue me permet d’observer et d’évaluer aussi les progrès : leur écoute et leur implication deviennent plus grandes, leur vocabulaire s’enrichit… Certains apprennent à surmonter leur peur face aux obstacles : crainte de sortir hors de l’école, de prendre la parole… Les élèves entrent peu à peu dans la narration. D’autres vont acquérir une appartenance au groupe et une histoire commune.

Pour toute information sur le projet handicap « cinquième jour » et sur notre association, n’hésitez pas à nous contacter : lespep75.com/contact